C’est la vie © Tony Dočekal
Le dos d’un homme, c’est la vie…
Aujourd’hui, le temps est plaisant.
Le soleil embrasse mon visage.
Le vent caresse mes cheveux.
Je me promène, dans ces ruelles dont je ne connais rien.
Les bateaux suivent le flot des vagues, et moi, je contemple les promeneurs au bord du lac.
Je pense, à la vie, à ma vie, à celle des autres – à l’accomplissement, au dur labeur.
Que faire ? Quels chemins ? Comment ? Et quand ?
Je me laisse porter par mes pas, vers où dois-je me diriger ?
L’oeil ouvert, admiratif, j’observe, j’attends. Plénitude.
La Serrurière, premier lieu de rencontre, premier lieu de ravissement.
Le dos d’un homme, inconnu, s’oppose à moi, juste là.
Je m’avance vers ce corps étranger, qui pourtant, immédiatement, me saisit d’une étrange familiarité.
Un corps plein de force, affaibli par l’usure de la lutte, du combat – accordé à l’élan du mouvement.
Les muscles contractés, la beauté du corps, du geste.
Une violente douceur.
Sensualité, envoûtement abrupt.
Un profond sentiment de désarroi me parvient.
Mais le réconfort intervient – message céleste –
Une métaphore visuelle de ce que représente ma vie, mon individualité.
Et ce soleil qui illuminait mon visage quelques minutes plus tôt…
Demeure maintenant, tapant sur son dos.
Une cicatrice, brisure de l’être, en profondeur.
Encrée à jamais, par-dessus, par-dessous l’épiderme.
Dépérir ou se relever ?
S’effondrer ou résister ?
La bataille, le courage, et la force – tentative de liberté, intention de prospérer –
Le corps fragile, le corps fort, le corps puissant et beau.
La douceur des couleurs, la douceur des textures – grain de peau.
Fatalité de la vie, épreuves sans trêve.
Le cheminement se veut encore long.
« C’est la vie ». Oui, c’est la vie !
Ce corps qui n’est pas le mien.
Cette cicatrice que je n’ai pas.
Et pourtant, je ressens son empreinte dans chacun de mes membres.
Mais alors, dis m’en davantage sur ta douleur…
La Serrurière. Vevey. sept 2024
